L’ancien haut conseiller du président des États-Unis, Elon Musk, manifeste peu de sympathie envers l’Union européenne, allant parfois jusqu’à diffuser des affirmations erronées à son sujet. Le retrait de son réseau social X, en mai 2023, du Code de bonnes pratiques contre la désinformation en est une illustration concrète.
Le phénomène des fake news n’est pas nouveau ; avec la montée en puissance d’Internet, des plateformes numériques et des réseaux sociaux, la désinformation prend aujourd’hui une ampleur inédite. Elle est accentuée par les algorithmes de tri et de recommandation, qui génèrent des bulles de filtres et favorisent la personnalisation de l’information, contribuant à isoler les internautes dans des espaces idéologiques clos.
Ces environnements numériques favorisent l’émergence de discours complotistes, de rumeurs sur Internet et de propagande numérique, mettant en péril le pluralisme de l’information. Paradoxalement, les acteurs à l’origine de ces contenus se réclament souvent de la liberté d’expression numérique.
Face à cette menace croissante, l’Union européenne, fondée sur les valeurs de démocratie, de respect des droits fondamentaux et de sécurité numérique, se doit d’agir pour contrer les tentatives de manipulation de l’opinion publique.
Une stratégie européenne structurée pour lutter contre la désinformation
Depuis 2023, une commission spéciale sur le “bouclier européen de la démocratie” a été mise en place au Parlement européen. Elle se penche sur les cas d’ingérence électorale, notamment étrangère, dans le processus démocratique européen. Cette réponse vise directement les campagnes d’influence menées par la Russie ou certains courants politiques aux États-Unis.
Mais cette initiative s’inscrit dans un ensemble plus vaste de mesures comprenant la réglementation européenne du numérique, la recherche, l’expertise, et la régulation des contenus numériques, afin de lutter contre l’intox informationnelle.
Le Digital Services Act (DSA)
Le Digital Services Act (DSA), ou législation européenne sur les services numériques, est entré en application en 2023. Il impose de nouvelles règles aux GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft) et autres grandes plateformes opérant dans l’Union européenne. L’objectif est de créer un espace numérique plus sûr et respectueux des droits fondamentaux.
Ce texte prévoit notamment :
- La suppression rapide des contenus illicites et des fausses informations en circulation ;
- La transparence sur les algorithmes de recommandation ;
- Des obligations de modération de contenu ;
- Un régime de sanctions dissuasif : jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires annuel mondial de l’entreprise en cas de non-respect.
Le Media Freedom Act
Adopté en 2024, le Media Freedom Act vise à garantir la liberté des médias, leur indépendance éditoriale et le pluralisme de l’information dans l’ensemble de l’Union. Il s’attaque ainsi indirectement à la désinformation européenne en surveillant les concentrations médiatiques et les interférences politiques.
Un comité européen pour les services de médias est chargé de veiller à l’application de ces règles et à l’évaluation des risques liés à la cyber propagande.
L’IA Act
La régulation européenne sur l’intelligence artificielle, ou IA Act, marque une première mondiale, qui entrera pleinement en vigueur en 2026. Le texte adopte une approche fondée sur les risques, avec une typologie des systèmes d’IA :
- Risque minimal : pas de contrainte particulière ;
- Risque limité : obligation de transparence algorithmique ;
- Risque élevé : encadrement strict en cas de menace sur les droits fondamentaux ;
- Risque inacceptable : interdiction pure et simple
L’objectif est double : encadrer les intelligences artificielles tout en stimulant l’innovation technologique européenne. Le non-respect du règlement pourra entraîner des sanctions allant jusqu’à 7 % du chiffre d’affaires annuel mondial de l’entreprise, ce qui représente une amende maximale de 35 millions d’euros.
Ainsi, malgré la volonté affichée de l’Union européenne, la désinformation n’a, pour autant, pas encore disparu des réseaux sociaux. Néanmoins, les oppositions de Donald Trump, Elon Musk et Mark Zuckerberg (patron de Meta) à l’encontre du règlement DSA témoignent bien des effets attendus de cette législation sur les GAFAM et autres géants du numérique.