Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), aussi connu sous son nom anglais Carbon Border Adjustment Mechanism (CBAM), est une mesure clé de l’Union européenne pour lutter contre les fuites de carbone et promouvoir une tarification équitable des émissions de gaz à effet de serre. Ce mécanisme marque une étape importante dans la mise en œuvre du Pacte vert européen, visant à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050.
Une mesure ambitieuse inscrite dans le Pacte vert
Longtemps évoquée (dès 1991), l’idée d’un ajustement carbone aux frontières a ressurgi avec force en 2019, dans le cadre du Pacte vert (ou Green Deal), qui propose une vaste feuille de route environnementale. L’objectif climatique européen est clair : réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport à 1990. En juillet 2021, la Commission européenne a présenté son paquet Fit for 55, dans lequel le MACF occupe une place centrale.
À quoi sert le MACF ?
Concrètement, ce mécanisme d’ajustement vise à renforcer l’efficacité du système d’échange de quotas d’émission (SEQE) en évitant que les efforts climatiques de l’UE ne soient contournés par l’importation de produits fabriqués dans des pays aux normes environnementales plus souples. Il repose sur le principe du pollueur-payeur, en imposant aux produits importés un prix du carbone équivalent à celui payé dans l’UE.
Cette mesure cible les émissions issues de certains secteurs jugés très intensifs en carbone : acier, aluminium, électricité, hydrogène, engrais et ciment. L’objectif est de prévenir les fuites de carbone — le déplacement d’industries hors UE — tout en maintenant une concurrence équitable entre les producteurs européens et étrangers.
Comment fonctionne ce mécanisme ?
Depuis le 1er octobre 2023, le MACF est entré dans une phase transitoire prévue par le règlement (UE) 2023/956. Jusqu’à fin 2025, les importateurs doivent seulement déclarer les émissions carbone associées aux produits importés. Ce reporting environnemental se fait auprès des autorités compétentes nationales, désignées par chaque État membre (comme la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) en France).
À partir de 2026, les importateurs devront acheter des certificats MACF, dont le prix sera aligné sur celui du marché carbone européen. Ces certificats visent à répliquer le système de quotas d’émission payé par les entreprises européennes, afin d’assurer une forme de conformité réglementaire douanière carbone.
Jusqu’en 2034, certaines entreprises continueront de recevoir des quotas gratuits dans le cadre du SEQE européen, afin d’accompagner la transition. Toutefois, ces quotas seront progressivement supprimés afin que les règles s’appliquent de manière équitable à tous les acteurs économiques. Des évolutions futures sont également envisageables, via l’orientation générale du Conseil ECOFIN et le projet Omnibus qui vise à simplifier certains dispositifs réglementaires ou administratifs.
Un dispositif controversé
Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières soulève des critiques à l’international. Plusieurs pays – notamment les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) – dénoncent une mesure néo-protectionniste servant à défendre les intérêts des entreprises européennes. Certains pays en développement, comme le Mozambique ou le Zimbabwe, déjà dépendants des exportations de matières premières, redoutent un frein à leur croissance.
Dans le même temps, certaines industries européennes s’inquiètent du risque de perte de compétitivité ou d’un ralentissement des efforts de réindustrialisation. En réponse à ces préoccupations, la Commission prévoit que l’outil soit revu tous les six mois, permettant d’éventuelles modifications réglementaires.
La fin des voitures thermiques : une autre mesure structurante du Pacte vert
Parmi les autres mesures phares du Pacte vert, figure l’interdiction prévue de vendre des voitures thermiques (essence, diesel) à partir de 2035 sur le territoire européen. Cette mesure interdira la mise sur le marché de voitures neuves émettant du CO₂, au profit de véhicules électriques ou à hydrogène, s’inscrivant dans l’objectif de zéro émission nette.
Pour approfondir les différentes dimensions de la politique environnementale européenne, vous pouvez consulter les autres articles publiés sur notre site, comme :
Consultez également les 13 mesures de la Commission européenne concernant le Pacte vert et le MACF sur le site de référence Toute l’Europe.
Foire Aux Questions (FAQ) – Pour aller plus loin
Quels produits sont concernés par le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) ?
Le MACF s’applique actuellement à l’importation de produits issus de secteurs à forte intensité carbone : acier, aluminium, ciment, engrais azotés, hydrogène et électricité. Cette liste pourra évoluer avec l’élargissement du dispositif à d’autres secteurs industriels concernés par la tarification carbone et les enjeux du marché carbone européen.
Qu’est-ce qu’une fuite de carbone et pourquoi le MACF cherche-t-il à la limiter ?
La fuite de carbone désigne la délocalisation de la production d’un pays (ou d’un groupe de pays comme l’Union européenne) vers une zone où les réglementations climatiques sont moins strictes. Cela se fait généralement pour éviter les contraintes du système d’échange de quotas d’émission (SEQE) ou échapper à la taxe carbone aux frontières. Le MACF vise à limiter ce phénomène en harmonisant le prix du carbone appliqué aux importations et aux productions européennes, afin de préserver à la fois la compétitivité industrielle et l’efficacité des politiques de lutte contre les gaz à effet de serre.
Le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) pourrait-il inspirer d’autres réglementations internationales ?
Oui. L’Union européenne, à travers la mise en œuvre du MACF et du Pacte vert européen, joue un rôle moteur dans la lutte contre les émissions mondiales de gaz à effet de serre. Plusieurs pays – comme le Royaume-Uni, le Canada ou les États-Unis – étudient aujourd’hui des dispositifs similaires de tarification carbone aux frontières pour protéger leur marché et accélérer la transition écologique.